L’histoire politique haïtienne entre dans une phase inédite et périlleuse.
Depuis le 7 août 2025, pour la première fois,
deux représentants officiels du patronat occupent simultanément
les plus hautes fonctions de l’exécutif.
Cette situation n’est pas un simple fait divers politique ;
elle est le symptôme d’une évolution profonde et alarmante
des rapports entre l’État et les puissances économiques.
Elle consacre la mainmise d’une oligarchie sur les leviers de la nation,
au détriment du bien commun.
De la collusion à la fusion
Historiquement, l’État haïtien a souvent été l’instrument d’élites exploitantes,
militaires ou politiques, servant des intérêts claniques.
La donne actuelle est différente.
Ce à quoi nous assistons n’est plus une simple collusion,
mais une fusion structurelle.
Le pouvoir n’est plus influencé par le patronat ; il est le patronat.
La bourgeoisie de prédation
Cette configuration ouvre la voie à un État entièrement soumis aux intérêts
d’une caste particulière, que certains analystes nomment, à juste titre,
une « bourgeoisie de prédation ».
Cette bourgeoisie ne tire pas sa richesse de l’innovation,
de la production ou de la création de valeur partagée.
Son modèle économique repose sur le pillage des ressources,
la rente, des pratiques monopolistiques et, trop souvent,
une collusion avec les activités criminelles.
Son enrichissement est directement proportionnel
à l’appauvrissement de la majorité.
En confisquant l’État, le secteur privé se donne les moyens de parfaire et de légaliser
son système d’exploitation, en orientant les politiques publiques,
les marchés publics et les réformes législatives à son seul profit.
Un système anti-démocratique
Face à cette confiscation de la souveraineté nationale,
les appels à la modération ou à l’autorégulation sont illusoires.
Le lobbying, désormais institutionnalisé au sommet de l’État,
n’a que faire de l’intérêt national s’il devient un obstacle au profit immédiat.
Un pouvoir économique qui ne reconnaît aucune limite à son influence
et aucun contre-pouvoir devient intrinsèquement anti-démocratique.
Il corrode les fondements même de la République.
La nécessité d’une rupture radicale
Il ne s’agit donc plus de réformer à la marge,
mais d’opérer une rupture radicale.
Une révolution politique et économique est indispensable.
Elle doit viser à démanteler ce système prédateur
pour le remplacer par un État tourné vers la production,
la justice sociale et la bonne gouvernance.
Deux fronts prioritaires
Cela implique une action résolue et immédiate sur deux fronts :
- Une justice indépendante doit mener des enquêtes approfondies
et sans concession contre la corruption, l’évasion fiscale et les enrichissements illicites. - L’État, libéré de ces griffes, doit investir massivement dans
l’économie productive : agriculture, petite et moyenne industrie,
énergies renouvelables et éducation.
Il s’agit de créer de la richesse collective et des emplois durables,
non de concentrer les privilèges.
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