Les crises haïtiennes comme défis et opportunités
Les crises socioéconomiques et politiques des XXᵉ et XXIᵉ siècles en Haïti ne sont pas seulement l’expression de l’échec des politiques publiques et de la diplomatie étrangère à l’égard du pays. Elles représentent aussi des opportunités de négocier et de promouvoir des solutions politiques et économiques durables.
Contexte historique
Contrairement aux crises du XIXᵉ siècle, survenues dans un contexte de non-reconnaissance internationale de l’indépendance haïtienne et d’étouffement diplomatique du développement d’une société postcoloniale, la crise actuelle interroge : quelles opportunités s’offrent aux acteurs pour discuter et tracer des voies salutaires au commerce et à l’industrie nationaux, asphyxiés depuis des décennies ?
Analyse des facteurs de la crise économique
Effondrement de l’économie nationale
L’effondrement de l’économie nationale depuis la chute de la dictature en 1957, aggravé par les programmes d’ajustement structurel imposés par le FMI, la BID et l’OMC au gouvernement de René Préval en 1996, découle des goulots d’étranglement subis par le commerce et l’industrie.
- Des tarifs douaniers élevés sur les exportations d’un secteur primaire sous-productif creusent le déficit commercial et pèsent sur le PIB.
- La limitation des industries nationales à la sous-traitance étouffe l’innovation dans le secteur secondaire.
Facteurs aggravants
- La corruption affaiblit les contrôles institutionnels des importations et la collecte des taxes.
- L’étroitesse de l’assiette fiscale empêche le financement public des entreprises locales.
- La dépendance à l’aide financière internationale est devenue une manne pour les gouvernements successifs durant ces décennies de crise structurelle, ponctuée d’événements sociopolitiques conjoncturels.
Initiatives avortées et obstacles structurels
Le programme de politique financière de Patrick Salomon
Le programme de politique financière annoncé par l’ancien ministre Patrick Salomon (successeur de Wilson Laleau) n’a jamais été appliqué, en raison de la crise de gouvernance liée à des élections contestées. Ce plan prévoyait :
- Une politique monétaire concertée avec la banque centrale pour revaloriser la gourde face à l’inflation du dollar.
- Une régulation du marché informel, responsable d’une évasion fiscale privant l’État de recettes.
- Un soutien financier à l’industrie nationale et aux PME, en partenariat avec le ministère du Commerce et de l’Industrie.
La chaire universitaire de commerce et d’industrie
La création d’une chaire universitaire de commerce et d’industrie à l’Université d’État d’Haïti (UEH) par le recteur Fritz Deshommes devait réorienter les politiques publiques. Cependant :
- Cette initiative n’a nourri que l’espoir d’une cooptation de jeunes cadres aspirant à intégrer la bureaucratie ministérielle.
- Les problématiques cruciales – entrepreneuriat, marché informel, concurrence déloyale des produits d’exportation, freins à la production nationale, marasme industriel – n’ont pas fait l’objet de recherches opérationnelles par les étudiants, pourtant censés éclairer le ministère, lequel manque d’ingénierie pour concevoir des politiques dynamisantes.
Défis actuels et entraves majeures
Contrôle par les groupes armés
Quelle utilité, cependant, pour cette chaire de formation, si le ministère du Commerce et de l’Industrie est pris en otage par les groupes armés contrôlant le centre administratif et les zones industrielles de Port-au-Prince et de l’Ouest ?
Influence de la mafia syro-libanaise
Comment opérationnaliser des politiques nouvelles dans un ministère vassalisé par la mafia syro-libanaise du commerce d’importation ? Celle-ci, en parrainant des groupes armés dans l’Artibonite, la plaine du Cul-de-Sac, Kenscoff et l’Arcahaie, asphyxie :
- La production agricole nationale.
- La petite industrie locale.
Ces questions appellent les médias, experts en économie et développement, stratèges de sécurité publique, entrepreneurs et coopérateurs internationaux à discuter et à prendre des décisions radicales.
Il s’agit de rompre avec :
- La contrebande, les fraudes et l’évasion fiscale.
- La corruption entrepreneuriale.
- L’économie criminelle (trafics d’armes et de stupéfiants) qui nourrissent un banditisme économique et politique.
Vers une synergie pour le redressement
Quels que soient les saupoudrages du ministre actuel ou futur du Commerce et de l’Industrie, le sauvetage de l’économie par un relèvement du commerce et de l’industrie nationale devra être le fruit d’une synergie entre tous les secteurs conscients de la dimension structurelle de la crise haïtienne.
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