Comme bon nombre de zones en Haïti, le Champ-de-Mars est tombé dans les griffes des gangs armés. Aujourd’hui, il est vidé de ses marchands, de ses laveurs de voitures, de ses « Kokorat ». De tout.
Cœur symbolique de la capitale, jadis lieu de pouvoir, le Champ-de-Mars sert aujourd’hui de marchepied aux bandits armés qui l’investissent intermittemment pour attaquer le Palais national qui résiste encore, sans être inexpugnable à l’évidence. Sous équipées, les forces de l’ordre font de leur mieux pour repousser les ‘terroristes’ à chaque fois qu’ils envahissent le lieu de l’hommage aux Héros de l’Indépendance. Mais, en dépit de la résistance dont font montre les unités spécialisées de la PNH, toute la nation vit dans la hantise que le haut symbole du pouvoir politique, le Palais présidentiel, tombe un jour entre les mains des caïds. On croise les doigts, on prie les saints, on invoque les loas, on conjure le pire…
Les lieux historiques, les espaces sacrés, les écoles et centres commerciaux à grande réputation n’existent plus. Haïti est aujourd’hui plus qu’hier dépouillée de sa mémoire, de tout ce qui donnait à voir et à entendre son histoire, ses rêves, ses espoirs, ses déboires. C’est le déracinement. C’est la mort de tout. La capitale haïtienne, devenue haut lieu d’insalubrité par excellence avec le temps mais gardant toutefois ses contrastes et son pittoresque, n’est que l’ombre d’elle-même à l’heure où s’impose la loi de la déraison des gangs armés.
Dans leur folie cynique, les caïds ont tué une fois pour toute la vie bouillante de Port-au-Prince comme les Politiciens, avant eux, ont éliminé dans leur vision crétinisante son carnaval. La Première République noire perd définitivement cette capitale qui la résume, cette capitale où se trouvent éparpillés les restes de ce qui reste de l’Etat.
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